La science inexacte qu'est le scouting

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Maxime Lauzier

Publié le 10 février 2018 à 12h30

C’est connu de tous. Les dépisteurs, même les plus émérites, peuvent se tromper. Parfois, ils feront de grands coups, mais dans d’autres cas, ils peuvent se fourvoyer royalement. Tout récemment, nous avons appris le départ à la retraite (temporaire) de l’ancien premier choix overall de l’encan 2013 : Mark Appel. Celui qui a été préféré à des gars comme Kris Bryant, Clint Frazier, Jon Gray, J.P. Crawford ou Hunter Renfroe a accroché ses crampons. Pourtant, on voyait Appel, il y a quelques années, comme étant le choix le plus logique au premier rang.

Bien entendu, puisqu’il s’agit d’une retraite « temporaire », il est possible que Mark Appel revienne sur la butte un jour. Quoi qu’il en soit, s’il ne revient jamais, il serait le troisième « premier choix » à n’avoir jamais atteint les Majeures. Les autres étant Steve Chilcott (1966) et Brien Taylor (1991). Les statistiques d’Appel dans les mineures sont très peu reluisantes : un dossier de 24-18 et une moyenne de points mérités de 5.06 ayant alloué 412 coups sûrs en 375 manches de travail.

Carrière NCAA

Au niveau high school, Appel avait déjà plusieurs dépisteurs à ses trousses. Dès lors, on le voyait comme un talent de premier ordre. Cependant, étant donné qu’il était déjà commis à l’université de Stanford, cela l’a relégué à la 15e ronde. Il a tout de même été sélectionné par les Tigers en 2009. Pendant ce temps, il a été bien observé par les experts lors de son passage à Stanford.

À l’époque du repêchage de 2012, Appel a terminé son année junior (joueur de troisième année) avec une fiche de 10 victoires contre deux revers. Il affichait une moyenne de points mérités de 2.56. Mark Appel était considéré comme un talent de premier niveau à ce moment. Il va donc sans dire qu’il a été vu et observé par plusieurs dépisteurs de plusieurs équipes. De plus, même les assistants spéciaux et directeurs généraux ont sans doute vu Appel à l’œuvre. Les Pirates de Pittsburgh ont fait de lui leur premier choix en 2012, huitième au total. Passé de la 15e ronde à la première en trois ans… ce n’est pas rien!

Mark Appel, repêché au 1er rang en 2013 par les Astros
Photo : Yahoo Sports

À la suite des demandes trop élevées lors de la tentative de signature de contrat, les Pirates n’ont pas pu s’entendre avec Appel. Il est donc retourné à Stanford pour entreprendre sa dernière saison collégiale (saison senior).  En termes clairs, tous ceux qui ont épié Appel en 2012 avaient la chance, encore une fois, de pouvoir observer attentivement ce choix de première ronde. Après avoir excellé – une fois de plus – à Stanford (10-4, 2.12 MPM), ce sont les Astros qui ont confiance à Appel. L’équipe texane a fait de lui son tout premier choix de 2013 (devant Kris Bryant). Les Astros se sont entendus rapidement avec le « prodige », mais ça s’est gâté!

La descente…

Dès ses premières foulées dans la Midwest League, les scouts ont été surpris (et déçus!) par Appel. Il était capable du meilleur comme du pire. Des soirs, on voyait un Appel en contrôle de sa rapide et de sa glissante. D’autres soirs, on voyait un Appel désemparé. Il perdait le contrôle de sa glissante, son changement de vitesse n’était pas au point et sa rapide affichait des vitesses inférieures à 90 mph.

Les dépisteurs ont mis peu de temps à le « rétrograder » comme étant un potentiel partant à un releveur de second plan… un inning eater que l’on dit dans le jargon! La qualité de ses lancers ne pouvait égaler les vitesses sur le radar. Il était incapable de mystifier les frappeurs adverses. En quelques mois à peine, on constatait déjà la descente…

La saison 2014 a été encore pire pour Appel. Une fois de plus, les dépisteurs et les assistants spéciaux ne savaient plus où donner de la tête. Leur prospect numéro un n’était plus l’ombre de lui-même. On était à des milles de ce que l’on avait vu de lui au niveau collégial.

Un changement d’air bénéfique? Non…

Mark Appel dans l'uniforme des Phillies
Photo: The Japan Times

En 2015, il a été échangé aux Phillies de Philadelphie avec entre autres Vince Velasquez dans l’échange qui a vu Ken Giles quitter Philadelphie pour se joindre aux Astros. On croyait que cela serait bénéfique pour Appel. Or, nous nous sommes trompés. Appel n’a jamais retrouvé ses moyens. Il a été limité à huit départs dans les filiales des Phillies en 2016. À Lehigh Valley, il a présenté une fiche de 3-3 avec une MPM de 4.46.

Après avoir été contraint de ne plus jouer en 2016 à la suite d’un éclat d’os dans un coude, les Phillies avaient bon espoir qu’Appel revienne en force en 2017. Cependant, en 17 départs, il a conservé une moyenne de points mérités de 5.27 et il a alloué presque autant de passes gratuites (53 buts sur balles) que de retraits au bâton (60).

Retraite (temporaire) du baseball

Le mois dernier, le jeune Appel a annoncé sa retraite temporaire du monde du baseball. Il veut retourner sur les bancs d’école pour décrocher un MBA. Malgré tout le « hype » autour de lui, il n’aura jamais pu faire sa place dans les Majeures. Pourtant, un nombre incroyable de scouts l’ont observé. Il a été étudié, épié, disséqué, mais personne n’a pu prévoir que celui qui regorgeait de talent au niveau collégial ne serait jamais en mesure de transposer cette domination dans les ligues mineures.

Malheureusement, le scouting n’est pas, et ne sera jamais une science exacte. Certes, pour un fan des Astros ou même des Phillies, le cas d’Appel est décevant. Par contre, cela fait partie du sport, et c’est, en quelque sorte, ce qui rend le sport professionnel tellement intéressant!

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